Le sénateur Jean-Pierre Grand nous a adressé une « Lettre aux Héraultais ».


Voici ma réponse…
Monsieur le Sénateur,
J’ai reçu votre « Lettre aux Héraultais » du 2 novembre 2022 et je vous en remercie.
Je me permets de vous livrer ici les quelques réactions qu’elle m’inspire.
Vous semblez regretter que le Président de la République ne dispose que d’une majorité relative à l’Assemblée Nationale. Cette situation ne tombe pourtant pas du ciel, elle provient du résultat souverain des élections de juin 2022.
Cela traduit le fait que les politiques menées durant le quinquennat 2017-2022 n’ont pas été aussi bénéfiques aux français que vous le pensez. Dans le cas contraire, ils auraient reconduit la majorité absolue en faveur du Président Macron.
Dès son élection en 2017, Emmanuel Macron s’est en effet empressé d’alléger la fiscalité sur les plus riches avec la transformation de l’ISF en IFI, l’instauration du PFU, la suppression de l’exit-tax, pour un coût total pour les finances publiques d’environ 5 milliards d’€.
En même temps (!), les APL ont été diminuées de 5 € par mois, les contrats aidés ont été supprimés, 17 600 lits d’hôpitaux ont été fermés…
Vous évoquez les mouvements sociaux violents auxquels le pays a été confronté. Mais le mouvement des « gilets jaunes » ne trouve-t-il pas son origine dans une mesure injuste d’augmentation des taxes sur les carburants qui pénalisait principalement les classes populaires de la France périphérique ?
En tant que Sénateur, vous êtes un ardent défenseur des collectivités locales. Et en ce domaine aussi, il y a à redire, avec la diminution de l’autonomie financière des collectivités due à la suppression de la Taxe d’habitation, de la CVAE et le retour des « contrat de Cahors » dans une version durcie…
Les communes et leurs élus, confrontés à la baisse de leurs moyens et au recul des services publics, se sentent abandonnés. Nous sommes obligés de déployer des trésors d’inventivité et d’énergie pour pallier à ces manques. Ainsi, dans ma commune de Capestang, nous avons créé un Centre Municipal de Santé qui compte désormais 4 médecins salariés, pour faire face à la désertification médicale. C’est ce genre de sujets qui sont le quotidien des élus locaux et des Français. Je pense que vous feriez œuvre utile en les portant au débat du Sénat.
Quand vous écrivez qu’avant 2020, la vie s’écoulait « sans conséquences majeures et durables pour notre vie quotidienne », vous semblez oublier les quelque 5 millions d’inscrits à Pôle Emploi, les près de 9 millions de pauvres, les millions de nos compatriotes qui sont mal-logés ou en précarité énergétique et toutes celles et ceux qui ne peuvent vivre dignement de leur salaire…
C’est tout cela qui a engendré la montée du Rassemblement National, qui compte désormais 89 députés. Emmanuel Macron, qui s’était présenté en 2017 comme un barrage au RN, est devenu par les politiques qu’il a menées pendant son premier quinquennat, un véritable tremplin pour cette droite extrême.
Vous évoquez la prétendue collusion entre la NUPES et le RN sur le vote de la motion de censure, mais le fait que le RN vote avec les députés Renaissance contre le SMIC à 1500 € et le gel des loyers ne vous a pas choqué outre mesure. Le bloc bourgeois sait toujours se retrouver quand il s’agit de faire barrage aux mesures favorables aux classes populaires.
De toutes façons, le parlementaire aguerri que vous êtes, sait bien que le vote du RN est stratégique et vise avant tout votre parti d’origine, Les Républicains. Le vote du RN en faveur de la motion de censure met en évidence que Les Républicains sont devenus la béquille du pouvoir macroniste. Cela permet au RN de grignoter encore des voix dans l’électorat de la droite dite « modérée ».
Car en définitive il est clair que le RN n’a rien à voir, dans ses propositions, avec la NUPES que ce soit en matière de répartition des richesses, de services publics, de transition écologique…
S’il en fallait une preuve supplémentaire, les propos du député RN De Fournas lors de l’intervention du député LFI Martens Bilongo, montrent le fossé qui sépare la NUPES du RN.
Pour terminer, je pense que la situation actuelle, pour grave qu’elle soit, ne justifie pas de donner un blanc-seing au Président Macron. Personne n’a le monopole de la République et s’opposer aux politiques délétères en matière de répartition des richesses, de refus de taxation des surperprofits, de destruction des services publics, de démantèlement de notre protection sociale (réforme de l’assurance chômage et des retraites) est parfaitement légitime et soucieux des intérêts de la Nation.
Proposer un autre chemin pour notre pays est plus que jamais nécessaire.
Et même si je n’ai pas eu la chance de devenir parlementaire en juin 2022 (en raison notamment de l’union des droites entre RN, LR et LREM qui s’est faite dans les urnes), je continuerai inlassablement à y prendre toute ma part.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Sénateur, l’expression de mes respectueuses salutations.
Cordialement,
Pierre POLARD
Maire de Capestang
Vice-président de la C.C. Sud-Hérault
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